véhicules électriques leasing social
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Outre le projet de réformes des critères d’attribution du bonus écologique, le gouvernement a récemment annoncé la finalisation du schéma de son dispositif de « leasing social ». L’État va ainsi missionner, grâce à un appel d’offres, les grandes entreprises de LLD. Avec un objectif : négocier avec les constructeurs et acheter les véhicules proposés ensuite aux ménages ciblés par ce leasing social.

La Première ministre Elisabeth Borne avait confirmé « la mise en place du leasing social cet automne, avec les livraisons des premiers véhicules électriques en 2024 », le 26 avril 2023, soit le jour de publication de la feuille de route du gouvernement. Toutefois, la communication n’est pas claire. Le gouvernement a souvent recours au terme « véhicules propres » et non pas « véhicules zéro émission ». Cela sous-entend que les véhicules « à faibles émissions », autres que 100 % électriques, pourraient être inclus dans le périmètre.

Une promesse de campagne

Car c’était une proposition de campagne d’Emmanuel Macron : une voiture électrique à 100 euros par mois pour les ménages modestes (ou leasing social). Le président de la République avait d’ailleurs rappelé ce projet au Mondial de l’automobile en mars 2023.

Problème : le véhicule électrique reste cher à l’achat (ce n’est pas un secret). France Stratégie relevait, dans une analyse publiée en 2022, que « malgré les aides, le passage à l’électrique reste inaccessible pour de nombreux ménages ». Ainsi, un véhicule électrique de segment B représentait un surcoût à l’achat d’environ 8 000 euros par rapport à un thermique.

900 000 ménages modestes potentiellement bénéficiaires

Dans l’attente de la finalisation du dispositif, le réseau européen d’ONG Transport & Environment (T&E) France et C-Ways, société de conseil en marketing d’anticipation spécialisée en data sciences, ont mené une étude. Ils ont ainsi évalué la faisabilité du leasing social en termes de coûts, identifié les ménages concernés et les acteurs pour mener à bien cette mesure.

C-Ways s’est appuyé sur les données du système d’immatriculation des véhicules et des données Insee sur le revenu des ménages. Il a ainsi évalué à 8,4 millions le nombre de ménages potentiellement intéressés par le dispositif en 2025. À savoir, les ménages des premiers déciles (D1 à D4), équipés d’un véhicule Crit’Air 2 et plus (diesel et essence immatriculées avant le 1er janvier 2011). Le leasing social concernerait donc les ménages au revenu fiscal de référence inférieur à 13 500 euros (D2 à D4). Avec une majoration pour les ménages du D1 aux revenus annuels inférieurs à 10 000 euros.

T&E a partagé ces résultats avec l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Les deux ont ainsi publié une analyse le 12 mai 2023.

Des aides de l’État à hauteur 27 % à 34 % du prix d’achat…

Selon cette analyse, environ 900 000 ménages modestes pourraient bénéficier du leasing social entre 2024 et 2030. Avec un loyer compris entre 70 et 200 euros par mois en fonction de la taille du véhicule. D’après les estimations, les véhicules en leasing social pourraient représenter 15 % des véhicules électriques en circulation durant cette période.

Mais à condition que l’État et la filière automobile s’y engagent. Pour atteindre cette cible d’une voiture électrique à 100 euros par mois, « l’État devra financer au minimum 27 % du prix d’achat du véhicule destiné au leasing social, dans la limite de 7 000 euros pour les ménages des déciles D2 à D4, soit le montant équivalent à celui du bonus actuel. Pour les ménages du D1, l’État contribuerait à 34 %, dans la limite de 9 000 euros. Pour les micro-cars, cette contribution pourrait se renforcer par rapport à ce qui existe aujourd’hui avec le bonus. Elle atteindrait 1 900 euros pour les ménages des D2 à D4 et 2 400 euros pour les ménages du D1, contre 900 euros aujourd’hui », a détaillé T&E.

… en remplacement du bonus

L’ONG a également souligné que l’État devra commander des véhicules électriques adaptés aux besoins réels. En proposant des modèles allant de la micro-car à la voiture familiale avec ces capacités de batterie : 10 kWh (micro-cars) et respectivement 25, 40, 60 kWh pour les segments A, B, C.

« Le gouvernement doit aller jusqu’au bout de sa promesse de départ. Notre analyse démontre qu’un leasing social de véhicules 100 % électriques est possible dès 2024 », a indiqué Marie Chéron, responsable des politiques véhicules à T&E France.

Selon l’analyse, l’État devra verser une enveloppe d’environ 800 millions d’euros par an. Soit « un engagement financier équivalent, voire moindre » par rapport à celui du bonus écologique estimé à environ 1 milliard par an.

Des véhicules à bas coûts

Avec la réduction des coûts de publicité et de distribution pour les constructeurs, ainsi qu’un niveau d’équipement et de performance adapté, T&E et l’Iddri estiment que le prix de revient des voitures électriques peut baisser de 20 à 30 % pour les modèles des segments A, B et C par rapport à celui du marché actuel. Les auteurs indiquent aussi que le catalogue de modèles devra être réduit.

« Un engagement de l’État sur la progressivité et la pérennité du financement du dispositif sur plusieurs années, constituent les signaux forts pour convaincre les constructeurs de s’engager dans le projet. Ainsi, ils ne percevront pas le leasing social comme un détournement de leurs capacités de production vers des véhicules à bas coûts et à faibles marges. Il s’agira au contraire d’un marché additionnel, sécurisé. Pour la filière automobile française, cela offre l’occasion de fabriquer des véhicules abordables de segment A et B, aujourd’hui délaissés ou produits hors d’Europe », assure Jean-Philippe Hermine, coordinateur de l’initiative Mobilité en Transition de l’Iddri.

Un leasing social d’une voiture électrique…

Concernant la gouvernance, les véhicules électriques seraient achetés via un organisme dédié regroupant l’État, des financeurs privés (banques, sociétés de leasing) et les collectivités locales, pour être ensuite loués.

« L’opérateur de leasing social louera ces véhicules électriques pour un loyer fixe. Le budget estimé dans nos calculs inclut la remise en état partielle du véhicule entre deux ayant droits et une couverture du risque ponctuel de défaut de paiement. Avec un loyer allant de 75 euros par mois pour une micro-car, à environ 100 euros par mois pour une petite citadine par exemple. Nous proposons que le leasing social se substitue progressivement au bonus écologique, accordé aujourd’hui sans condition », a repris T&E.

… avec entretien et réparation inclus

De plus, l’entretien et la réparation devront être inclus dans le contrat de leasing social pour assurer aux ménages bénéficiaires qu’ils n’auront pas de dépenses imprévues avec leur véhicule.

En contrepartie, il faudrait exiger des ménages locataires de maintenir leur véhicule en bon état. Les auteurs avancent plusieurs propositions, telle une formation obligatoire à l’entretien du véhicule lors de la prise en main. Ou encore un rachat possible du véhicule au bout de cinq ans avec un prêt à taux zéro (PTZ) et un contrôle technique/révision entretien annuel obligatoire.

Un mauvais usage ou une dégradation excessive du véhicule observé lors de la visite annuelle pourrait ainsi constituer un motif d’exclusion du ménage du dispositif. Et, à l’inverse, un tarif dégressif des mensualités pourrait s’appliquer lorsque le véhicule est conservé plus de trois ans dans des conditions d’entretien prédéfinies.

Une aide complémentaire versée par les collectivités

Les auteurs de l’étude évoquent également la nécessité d’aides complémentaires des collectivités de 1 000 euros à 2 000 euros par véhicule pour renforcer le dispositif, notamment dans les zones à faibles émissions-mobilité (ZFE-m).

La voiture électrique d’occasion exclue du leasing social ?

Le véhicule électrique d’occasion pourrait-il constituer une solution ? La réponse : « La possibilité de proposer un leasing social, à prix réduit, en s’appuyant sur le marché de l’occasion électrique, restera compromise pendant encore quelques années. En effet, le retard pris par les principaux acheteurs de voitures neuves que sont les gestionnaires de flottes professionnelles (53 % du marché du neuf en 2022) dans l’électrification de leur parc se traduit de facto par une offre d’occasion électrique restreinte. Même si le rythme de conversion des entreprises devait s’accélérer dans les années à venir, le retard pris prendra quelques années à se résorber », déplore Transport et Environment.



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Julie Vénier pour Floauto.com