Selon le plan covoiturage, lancé le 13 décembre 2022, 2,7 millions de trajets en covoiturage ont été effectués entre le début 2023 et le 11 avril dernier, à titre personnel ou dans le cadre des déplacements domicile-travail. Un bilan très positif, en partie lié à la prime au covoiturage lancée par l’État, qui peut atteindre 100 euros pour les primo-conducteurs. Mais aussi à la généralisation des plans de mobilité au sein des entreprises, qui favorisent souvent ce mode de mobilité partagée. Deux opérateurs Karos et Klaxit (récemment repris par BlaBlaCar) se partagent l’essentiel du marché du covoiturage BtoB.

« Avec les trajets domicile-travail, le covoiturage a un impact favorable sur le pouvoir d’achat : le conducteur est rémunéré et la participation aux frais, pour le passager, reste faible. Ce qui n’est pas négligeable en période d’inflation », estime Mélaine Pouchain pour Metro France. Cette responsable CARE lance cette formule avec Klaxit au siège et dans les cinq entrepôts de ce grossiste alimentaire et en équipements. Avec pour principal objectif une diminution de l’autosolisme et des émissions liées aux trajets domicile-travail.

Des incitations financières

De fait, le covoiturage décolle « du fait des incitations financières. La LOM a favorisé les subventions des collectivités qui peuvent prendre en charge une partie des frais du passager, explique David di Nardo, directeur grands comptes de Klaxit. Nous travaillons avec 55 collectivités qui participent à ces frais, souvent à hauteur de 1,5 à 3 euros selon le kilométrage. Ainsi, un passager qui covoiture sur 20 km et aurait dû payer 2 euros (0,10 euro/km) ne déboursera que 0,50 euro. Sans ce coup de pouce, beaucoup auraient tendance à continuer à prendre leur véhicule car 2 euros correspondent à peu près au coût du carburant sur 20 km », détaille David di Nardo. Et à cela vient s’ajouter la prime au covoiturage évoquée plus haut.

Des entreprises ont aussi lancé des forfaits mobilités durables qui intègrent le covoiturage. « Mais les salariés qui bénéficient de 500 ou 600 euros de forfait par an préfèrent souvent utiliser cette somme pour acquérir un vélo, rarement pour des petites sommes récurrentes comme le covoiturage », poursuit sur ce sujet David di Nardo.

Selon Alexandre Nepveu, chargé de projets mobilités chez Orange, « il y a plusieurs critères pour faire adhérer les collaborateurs. En règle générale, le covoiturage ne fonctionne pas quand les sites sont en centre-ville ou facilement accessibles en transports en commun. Et il fonctionne nettement mieux quand plusieurs entreprises se situent sur le même site et partagent la solution : le nombre de covoitureurs potentiels est alors plus élevé. 60 % de nos trajets en covoiturage sont effectués entre des salariés d’Orange et ceux d’autres entreprises », illustre Alexandre Nepveu. De son côté, le département de l’Essonne va lancer cette solution avec Karos et celle-ci sera ouverte à la fois aux agents du département et à ceux de la préfecture. Ce qui devrait favoriser la réussite du projet, en accroissant le nombre de covoitureurs potentiels.

La taille de l’entreprise et sa situation géographique représentent en effet des critères importants, confirme David di Nardo : « Il faut au moins une masse critique de 300 à 500 personnes. Et la collectivité peut jouer un rôle moteur en fédérant des entreprises. Ainsi, cinquante entreprises réparties sur plusieurs zones d’activités à Montpellier se sont inscrites au covoiturage, à l’initiative de la collectivité. Cela a favorisé la réussite du projet. » Les résultats sont donc meilleurs dans des zones où les transports en commun sont déficitaires et quand le nombre d’autosolistes est important.

Les conditions du succès

Autre critère, selon Klaxit : la typologie des salariés. Les cadres supérieurs ou ingénieurs seraient moins enclins à covoiturer que les employés ou ouvriers. « Et le covoiturage fonctionne mieux dans une grande usine excentrée, où il répond à un besoin et devient une vraie solution de mobilité, qu’au siège parisien d’une banque », expose David di Nardo.

À cet égard, le producteur de tracteurs AGCO, dans la zone industrielle de Beauvais, est un client idéal, avec des résultats probants : « 51 % des 2 400 personnes sont inscrites sur la plate-forme de covoiturage et 866 covoiturent régulièrement. On compte 3 000 à 4 000 trajets par mois. Cette réussite est due à une subvention importante de la collectivité qui prend totalement en charge la participation du passager, et à la communication menée par l’entreprise. Celle-ci a notamment mis en avant une baisse potentielle du temps de trajet, alors que des travaux en voirie ont, pendant plusieurs mois, fortement restreint les voies d’accès et créé des embouteillages à l’entrée du site. Ensuite, le pli était pris », relate David di Nardo. Et quand les résultats sont au rendez-vous, « avec 20 à 30 % de covoitureurs réguliers, on peut faire reculer l’autosolisme de 15 à 20 %. »

Une nécessaire communication

« Le covoiturage fonctionne à condition qu’il y ait une communication et un accompagnement. Nous avons déjà des relais RSE dans nos différents sites. Ce sont eux essentiellement qui font office d’ambassadeurs et portent le projet. Nous pouvons aussi imaginer de lancer des défis ou des challenges pour mettre en avant ceux qui covoiturent le plus et ainsi inciter les collaborateurs », avance Mélaine Pouchain pour Metro.

« Quand un site commence le covoiturage, Klaxit met en place des animations pour le lancement. C’est indispensable. Nous menons aussi des campagnes d’e-mails et nous installons des stands, par exemple près de la cantine, pour expliquer le fonctionnement du covoiturage car la communication est une des clefs de la réussite », indique Alexandre Nepveu pour Orange. « Des entreprises présentent la solution dans le livret d’accueil remis aux nouveaux salariés. D’autres réservent les places de parking, souvent les plus proches de l’entrée du site, aux covoitureurs. La solution est gagnante si l’entreprise a un rôle moteur », complète David di Nardo.

Des lignes de covoiturage

Créée en 2004, La Roue Verte s’est positionnée sur le créneau du covoiturage domicile-travail avec une plate-forme de mise en relation entre collaborateurs d’une entreprise ou d’une collectivité. En 2017, ce prestataire a développé illicov. Cette offre de lignes de covoiturage est proposée aux collectivités pour favoriser le covoiturage sur un territoire, et les salariés des entreprises situés dans la zone desservie en bénéficient.

« Grâce au vote des habitants et salariés, nous identifions les flux de déplacements les plus importants, afin de de déterminer des lignes de covoiturage avec les collectivités. Tout se passe sur l’application illicov : les conducteurs signalent leurs places et indiquent l’horaire auquel ils vont passer à l’arrêt. Les passagers n’ont plus qu’à réserver l’heure qui leur convient et à se rendre à l’arrêt quelques minutes avant », décrit Virginie Vassas, responsable développement de ce prestataire. Particularité de cette solution : « Elle vient en complément des transports en commun et permet aux collectivités de donner de l’attractivité au territoire, et aux entreprises d’offrir une réponse aux besoins de déplacement domicile-travail de leurs collaborateurs », ajoute Virginie Vassas. Comme pour les solutions de type Klaxit ou Karos, la communication est indispensable et La Roue Verte établit un plan de communication pour les collectivités, dont peuvent bénéficier les entreprises situées sur le territoire concerné.

Inciter, toujours

Cette solution est favorisée « par un système d’incitations décidées avec la collectivité qui gratifie les conducteurs-covoitureurs réguliers. La fidélité des conducteurs est ainsi valorisée par un système de bonus cumulés sous forme d’une cagnotte, en plus d’un montant versé par le passager pour la participation en frais, d’environ 0,10 euro par kilomètre en moyenne », détaille Virginie Vassas. Les passagers paient cette contribution à La Roue Verte qui la redistribue en fin de mois aux conducteurs, sachant que certains peuvent être conducteurs un jour et passagers le lendemain. Sans oublier à nouveau la prime au covoiturage proposée par l’État.



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Cyrienne Clerc pour Floauto.com