Rencontres Flotauto Paris 2024 conférences
Pascal Rascalon

Durant la quinzaine de conférences proposées dans le cadre des dernières Rencontres Flotauto 2024 à Paris, les gestionnaires de flotte ont multiplié les échanges. Et pour ouvrir cette journée, ils sont revenus sur les impacts de la réglementation et de la fiscalité sur les flottes. À l’image de Pascal Rascalon, chef de service déplacements et parc automobile à la direction des moyens généraux de la région Grand Est, soit plus de 1 900 véhicules dont 296 VP et 108 VUL : « En tant que collectivité, nous avons un devoir d’exemplarité. De 2020 à janvier 2024, la région Grand Est a considérablement verdi sa flotte de véhicules de service, passant de 90 à zéro véhicules diesel, et de 93 essences à 31. En parallèle, les véhicules essences/E85 sont passés de 89 à 145, les hybrides de 1 à 38 et les électriques de 9 à 28 », a rappelé Pascal Rascalon. Qui n’en souligne pas moins les écueils liés à l’électrification : « Nous sommes tributaires de l’évolution de l’industrie automobile pour que l’offre s’adapte à nos besoins et devienne plus accessible financièrement. »

Réglementation et fiscalité

Sebastien Escalais

Un constat partagé par Sébastien Escalaïs, responsable performance du parc à la direction des achats du transporteur Keolis : « Pour nos 600 véhicules de fonction, nous avons supprimé le diesel et basculé à l’essence depuis trois ans. Mais l’électrique bute encore sur des obstacles de praticité et de changement des habitudes. Notre nouveau catalogue sera un mixte de véhicules électriques et hybrides, avec l’objectif de supprimer les motorisations essence. Un tiers de notre parc est renouvelé chaque année. En attendant, nous absorbons l’impact de la fiscalité, sachant que les véhicules électriques vont coûter 20 % plus cher que les diesel », a exposé ce responsable.

Rappelons que les quotas de renouvellement en véhicules à faibles émissions (VFE, moins de 50 g de CO2), en application des lois d’orientation des mobilités (LOM) et loi Climat et Résilience, s’élèvent à 50 % pour l’État et ses établissements, 30 % pour les collectivités territoriales, leurs groupements et les entreprises nationales, et 20 % pour les entreprises privées, contre 10 % en 2023. Notons aussi que le 8 février, soit le même jour que les Rencontres Flotauto, Transport & Environment a publié son second rapport sur les renouvellements des grandes flottes en VFE en 2023. Et l’ONG a noté que 60 % des grandes entreprises ne respectaient toujours pas ces quotas.

Quels collaborateurs en électrique ?

Alors que les flottes n’ont pas d’autre choix que de se mettre au vert, les participants aux Rencontres Flotauto 2024 à Paris sont revenus sur l’identification des conducteurs éligibles à l’électrification. Pour ce faire, Saint-Gobain a créé un logigramme sur son intranet. Grâce à une série de questions, l’entreprise connaît le profil chaque conducteur afin de lui attribuer une motorisation en fonction de ses usages.

Thierry-Calot

« Si le conducteur parcourt plus de 35 000 km par an, il reste en thermique, mais le diesel est proscrit pour les VP. Sous les 35 000 km par an, le choix dépend de la fréquence des longs trajets et des possibilités de recharge. Si le conducteur ne dépasse pas les 200 km par jour trois fois par mois et qu’il peut installer une borne à domicile, nous lui attribuons un véhicule électrique. S’il parcourt plus de 200 km par jour trois fois par mois, le PHEV est adapté à condition qu’il puisse recharger chez lui ou sur site, pour les sédentaires », a résumé Thierry Calot, directeur général de Pop3P, la structure qui gère les 10 730 véhicules (10 % en hybride rechargeable et 1 % en électrique) de Saint-Gobain.

Chez Sanofi, le fonctionnement n’est pas très différent avec un profiler mis à disposition par le fleeter Traxall. Ce laboratoire pharmaceutique s’appuie sur plusieurs critères (kilométrage, lieu de résidence et nombre de grands trajets par an) pour sélectionner des motorisations adaptées aux conducteurs.

Des matrices et des profilers

Stéphane Antoinat

« Nos itinérants ne peuvent pas prétendre au PHEV car l’autonomie électrique ne suffit pas. Nous leur proposons de l’hybride simple (64 % du catalogue) ou de l’électrique. Les sédentaires peuvent opter pour l’électrique ou le PHEV, voire l’hybride simple, si l’installation d’une wallbox à domicile n’est pas possible », a détaillé Stéphane Antoinat, responsable du parc de Sanofi, soit 1 538 VP de fonction.

En revanche, le raisonnement est tout autre pour le groupe de distribution Lidl et ses 2 800 véhicules dont 487 électrifiés : « Nous ne faisons pas d’analyse au cas par cas, nous raisonnons par statut. Les sédentaires doivent passer au 100 % électrique. Par exemple, pour le comex, le choix comprend quatre modèles électriques et quatre PHEV en catalogue. Nous réfléchirons en fin d’année à imposer le 100 % électrique aux catégories sédentaires », a expliqué Ousmane Mbodje, responsable du pôle mobilité en charge du fleet et du travel management chez Lidl.

Quel TCO pour les hybrides ?

Mais le TCO de ces hybrides (simples ou rechargeables) est-il avantageux ? Pour la plupart des flottes présentes, la tendance est à un abandon prochain de l’hybride rechargeable (PHEV). « En 2020, nous avons commencé à acheter des hybrides. Notre retour sur le PHEV est mitigé d’un point de vue opérationnel : nous roulons surtout avec le moteur thermique, parce que nous n’avons pas forcément la place d’installer des bornes dans nos commissariats. L’hybride est donc transitoire et nous allons tester l’hydrogène », a témoigné Jean-Étienne Pingard, chef du service des moyens mobiles, direction de l’innovation, de la logistique et des technologies à la Préfecture de police de Paris. Le parc de 9 580 véhicules, avec 477 hybrides dont 238 PHEV, est exclusivement en achat.

Jean-Étienne Pingard

Jean-Étienne Pingard a apporté une précision importante : « Du fait de leur usage sévère, surtout en couronne parisienne, nos véhicules sont en général des épaves avant la revente. Nous comptons l’équivalent de 3 700 accidents sur un an. Ainsi, nous déboursons environ 21 millions d’euros de maintenance par an, comparativement aux 800 000 euros consacrés à l’achat de véhicules hybrides et électriques. Le coût de ces hybrides reste donc négligeable par rapport à nos autres dépenses », a nuancé Jean-Étienne Pingard.

Des TCO à la hausse

Alexandre Nepveu

Orange s’appuie, de son côté, sur 14 500 véhicules dont 22 % d’hybrides. « Nous conservons nos véhicules environ quatre ans. Pour des modèles équivalents, notre constat est qu’à la restitution, le TCO est d’environ 17 500 euros pour une Renault Zoé électrique, 19 000 euros pour une Citroën C3 essence et 27 000 euros pour une Toyota Corolla hybride ! Ces résultats ne nous encouragent pas à continuer avec l’hybride », a souligné Alexandre Nepveu, directeur de la gestion des véhicules. Et rien n’est simple : « Il y a quatre ans, nous avons lancé des formations pour accompagner les collaborateurs et nous avons installé 1 500 points de recharge dans les sites. Mais il nous arrive de trouver des câbles de recharge encore emballés dans le coffre de collaborateurs équipés d’un PHEV », a déploré ce responsable.

 Loïc-Marie Péquignot

Même constat chez Bugbusters, spécialiste du déploiement de solutions numériques, qui gère 100 véhicules. « En trois ans, nous sommes passés d’une flotte diesel à des véhicules électriques, hybrides simples et PHEV. Nous avons observé un TCO supérieur de + 15 % entre un thermique et un hybride, a relaté Loïc-Marie Péquignot, dirigeant de Bugbusters. Cette hausse s’explique par une montée en gamme pour les hybrides afin d’inciter les collaborateurs à les choisir ; par une consommation plus élevée (véhicules plus lourds avec leur batterie) ; et par le coût d’équipement en recharge (borne ou prise renforcée) sur site et/ou à domicile. Si l’hybride offre des gains d’image et à l’usage, nous nous tournerons plutôt vers de l’hybride simple plutôt que le PHEV qui reste mal utilisé », a conclu Loïc-Marie Péquignot.

En résumé : la transition énergétique, qui passe par des changements dans la gestion de la flotte, ne pourra se faire que si tous les acteurs concernés y mettent de la bonne volonté.



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Julie Vénier pour Floauto.com